Charlie Kirk — figure conservatrice américaine et fondateur de Turning Point USA— a été abattu alors qu’il répondait à une question. Ce meurtre, commis en pleine prise de parole publique, transforme un acte politique en tentative d’éradication du débat lui-même.
On assassine un homme et l’on croit abolir sa voix. Mais tuer un orateur, c’est toujours en consacrer la parole, car la violence révèle ce qu’elle voulait étouffer. L’acte commis dépasse sa personne : il exprime une pathologie politique, le refus radical du débat contradictoire. On ne discute plus, on élimine.
La liberté d’expression repose sur une idée simple et exigeante : tolérer ce qu’on abhorre. C’est là que le vernis craque aujourd’hui. Nos sociétés saturées d’émotions ne parviennent plus à transformer la colère en controverse, la contradiction en dialogue. Tout désaccord devient offense, tout adversaire se change en ennemi. Dès lors, le langage perd sa fonction de médiation ; il n’est plus l’espace commun où l’on s’affronte par des mots, mais une arme qu’il faudrait confisquer à l’autre avant qu’il ne la retourne contre nous.
Le geste meurtrier illustre une dérive plus large : la tentation morale d’éliminer ce qui dérange. Il ne s’agit plus d’affronter une opinion, mais de l’extirper comme on arrache une tumeur. Cette logique n’est pas neuve : toute idéologie qui prétend incarner le Bien absolu finit par délégitimer la parole adverse et justifier sa suppression. Mais ce qui change, c’est la vitesse avec laquelle ce réflexe s’installe, encouragé par les technologies qui transforment chaque désaccord en spectacle polarisé.
Certains diront que Kirk était clivant, outrancier, provocateur. Justement : si la liberté d’expression n’existe que pour les propos convenables, elle cesse d’être liberté. La démocratie se mesure à la place qu’elle accorde aux voix insupportables. Ce n’est pas le consensus qui garantit notre humanité politique, mais la capacité à supporter la dissonance.
Nous glissons vers une culture où la contradiction est vécue comme une agression insupportable. Défendre la liberté d’expression n’est donc pas un geste abstrait, mais une urgence vitale : elle seule permet que l’hostilité reste dans l’ordre des mots, non dans celui des balles.
Faut-il le répéter ? La liberté d’expression ne promet pas l’harmonie. Elle nous oblige seulement à rester dans le champ des mots plutôt que dans celui des coups. C’est peu, et pourtant c’est ce qui nous permet encore de vivre ensemble.
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