« (...) ce qui ne cesse de se produire et de se manifester le plus ouvertement devant nous –mais si continûment et de façon globale –pour autant ne se discerne pas. Discret par sa lenteur en même temps que trop étale pour qu’on le distingue. Il n’y a pas là éblouissement soudain qui aveuglerait le regard par son surgissement ; mais, au contraire, le plus banal : ce partout et tout le temps offert à la vue, de ce fait même, n’est jamais perçu –on n’en constate que le résultat. »
François Jullien
Les transformations silencieuses, Éditions Grasset
Imperception
Un changement s'est opéré
Imperceptible et continu
On ne peut le repérer
Glissement inconnu
Invisible à l'œil nu
Limite bordée d'insaisissables contours
Un chavirement se produit
Où finit le jour?
Où commence la nuit?
Soldes
Donner sa langue aux chats
Vendre son os aux chiens
Faits comme des rats
Mine de rien
Société du Silence
Tu préfèrerais que je ne dise rien
Que je souffle dans mon saxo
Tous ces couteaux
Plantés dans des reins
Que j’ignore
Coeur d'airain
Malheureux
Ces ponts d’or
Ou ces faux joyaux
Rivés à nos yeux
Tu voudrais que je me taise
Que je ne souffle sur des braises
Comment veux-tu que je reste coi?
Mes mots en écharpe?
Frire sous cape?
Que je mette un bémol?
Je t'aime !
Souviens-toi
Carpe diem !
Tu me demandes: pourquoi?
J'te réponds: tu es folle!
Savoir
Idées stériles
Mauvais goût pérenne
Babil futile
Ignorance sereine
Ultime tour de piste
Terminer sa vie
En clown triste
Qui n'a rien appris?
La mouche
C'était en janvier de l'hiver dernier
Une marée blanche avait ouvert les portes de l'ennuie
Les couleurs, les odeurs, la chaleur et les bruits
Tout cela s'en était allé
Sur une carreau gelé
Des étoiles givrées
Turbulences stratifiées
Baroques esquisses d'un artiste oublié
Sur le dos, couchée
Les pattes croisées
Immobile, pétrifiée
Elle attend
Le printemps