A propos d'un billet entendu à la radio de Radio-Canada le 8 juillet 2011 (C'est bien meilleur le matin).
Il est toujours très difficile de comprendre l'autre sans le juger surtout si cette personne est d'une autre culture que la nôtre. Le pire que l'on puisse faire, selon moi, est de voir l'autre uniquement selon nos préoccupations, notre politique de vie, notre vision personnelle des choses et des êtres bref, selon nos valeurs que l'on voudrait, bien sûr, universelles. Une illustration de ce danger nous est donné par le discours que tenaient, il n'y a pas si longtemps (et qui n'est pas tout à fait mort...) l'Afrique du Sud et les États-Unis sur les noirs. Il fut un temps où, incapable de comprendre ce qui était différent d'elles, ces deux sociétés considéraient les gens de couleurs comme inférieurs, sans intelligence, brutaux, sans âme etc. Il faut avoir lu quelques livres datant du 18-19ième siècle pour se rendre compte avec quels sûreté et aplomb ces gens dissertaient sur ces "hommes inférieurs", en toute bonne foi. Fondamentalement, je ne crois pas que cet esprit soit disparu, il prend simplement d'autres formes à d'autres niveaux. Le billet de madame Geneviève St-Germain en est un exemple...soft et insidieux
Madame St-Germain décrit Anne Sinclair comme une femme intelligente, ayant famille, compte en banque bien garni, métier d'écrivaine solide, animatrice allumée et curieuse, bref, une vie riche et globalement heureuse menée par une femme avec une tête sur les épaules. Il se trouve que Geneviève St-Germain ne peut concevoir ou imaginer un instant que madame Sinclair puisse faire des choix qui ne concordent pas avec ses valeurs à elle. Comme on a pu voir, Anne Sinclair a tous les outils nécessaires pour faire des choix éclairés concernant sa vie privée et professionnelle. Il me semble plus raisonnable de penser qu'Anne Sinclair ne tient pas les infidélités de son mari comme un si grand déshonneur, "péché mortel" pour reprendre une expression qui a terrorisé le peuple québécois pendant trop longtemps. Ou alors elle souffre mais y trouve finalement son compte. Je ne sais.
Pierre Eliot Trudeau a dit avec raison (pour une fois que je suis d'accord avec lui...) que l'état n'avait pas d'affaires dans la chambre à coucher d'un couple. Vous non plus madame St-Germain. Et tous les autres. Que connaissez-vous de leur intimité (on ne veut pas le savoir...)? De leur contrat personnel, de leur entente, de leur "politique interne"? Qui vous dit que madame Sinclair n'a pas d'amant(s)? Vous vous rappelez sans doute du couple Simone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre. Leur "contrat" était de cette nature me semble-t-il. Monsieur Sartre était un sacré baiseur et il arrivait même que madame de Beauvoir choisisse pour monsieur...Ça n'a pas empêché Simone de Beauvoir de jeter les bases du féminisme... Vous pourriez d'ailleurs lire (ou relire) avec intérêt le livre de cette grande écrivaine qui a pour titre "Lettres à Nelson Algren" chez Gallimard. On appréciera l'honnêteté de cette femme mais aussi ses contradictions, notamment sur sa conception de la liberté (pour elle) et celle pour...son amant. On ne peut pas sérieusement traiter Simone de Beauvoir de victime, pas plus que madame Sinclair!
On peut être d'accord ou non avec le genre de vie qu'Anne Sinclair s'est choisi. La poser en victime me parait nettement exagéré voire malhonnête comme cela arrive trop souvent lorsque l'on veut instrumentaliser des évènements pour sa cause, toute nécessaire qu'elle soit.