On ne peut que constater ces jours-ci qu'un certain langage est utilisé pour faire entendre des points de vue, pour exiger des changements, pour faire valoir des droits.
Le langage de la rue.
Entendons-nous bien. On sort dans la rue, on tape sur des casseroles, on défie la loi 78, on marche, on manifeste par milliers, on ridiculise souvent avec beaucoup d'humour. Bref on utilise toutes sortes de moyens qui ne sont pas disons...réguliers ou normaux, certains diraient civilisés...
On peut lire des articles de chroniqueurs qui s'offusquent, qui disent que dans un régime démocratique les choses se règlent au parlement, tranquilement assis. Que la raison doit faire son chemin, que les discussions seraient le moyen le plus correct de régler les conflits (c'est ce qu'on nous apprend à l'école), que la parole dans le monde moderne serait le seul moyen de communication, en tous cas le plus respectable. Soit.
Ces chroniqueurs et tous ces gens qui s'offusquent de voir les manifestations se dérouler soir après soir, même si ces manifestations sont, la plupart du temps, pacifiques et bon-enfants, ces chroniqueurs et autres gens dis-je, me paraissent soit d'une grande hypocrisie ou d'un aveuglement suspect.
Est-ce que ces gens qui semblent être porteurs à eux seul de la civilisation du bon-sens, pourront nous expliquer pourquoi alors le pays démocratique par excellence, présenté comme tel, les États-Unies, ont un budget militaire de plus de 708 milliards de dollars (2010)? Est-ce pour "discuter" qu'on dépense tant d'argent? Les Américains, apparemment (!), ont compris depuis longtemps que la force était la façon la plus sûr d'obtenir des résultats. Leur richesse provient en grande partie de leur capacité à rudoyer (le mot est faible) tout pays qui ne pencherait pas dans leur sens, qui ne souscrirait pas à leurs voeux.
Ce constat ne veut pas dire que je suis pour cette façon de faire, bien évidemment.
On voudrait faire croire que notre civilisation est pacifique? Alors là, permettez-moi de sourire. En apparence, nous vivons dans des pays dits civilisés mais si on gratte un peu, il est assez aisé de voir l'immense violence qui dirige et teinte nos actes.
Regardons un peu l'histoire: que ce soit pour (justement) la démocratie, pour une plus grande indépendance, pour plus de justice, plus d'équité etc., toutes ces idées ont été conquises, ont dû être défendues dans la rue, parfois les armes à la main pour être entendues. Dans une très grande majorité, c'est dans la rue que les choses les plus importantes ont été accomplies. Ça c'est de l'histoire. Rien ou presque n'a été donné. Il a fallut le conquérir.
Que ce soit la fin de l'apartheid en Afrique du Sud, la révolution française, la fin de l'esclavage aux États-unies, la réunification de la Chine par Mao dépecée par les pays occidentaux au 19ième siècle, la réappropriation des pays d'Amérique du sud par leurs peuples, l'indépendance de nombreux pays etc. Combien de luttes pour que nous parlions le français aujourd'hui au Québec?
L'Histoire nous apprend que la violence a toujours été nécessaire, dans une très large mesure, pour que des changements majeurs soient accomplis. Bien malheureusement.
Que des chroniqueurs, journalistes (pas tous hein...) et autres bien pensants, confortablement installés devant leur ordinateurs fassent les outragés devant les manifestations répétées et somme toute pacifiques des contestataires me fait bien rigoler.
Il est fort à parier que leurs enfants profiteront (comme eux et nous tous profitons, aujourd'hui, du courage qu'il a fallu à des gens qui ont dit "non" dans le passé) des améliorations, d'une plus grande justice et une plus juste répartition des richesses exigées par les manifestants.
Les discussions viendront après qu'un rapport de force soit établi. Pas avant.
Triste constat mais pourtant bien réel.