Lâcheté. Un mot plus tellement utilisé mais qui fait froid dans le dos quand on y pense. Un mot qui peut parfois résumer une vie. Un mot qu'on a peur d'utiliser car dans un monde "politically correct", celui qui a remplacé "sourd" par "malentendant", "aveugle" par "non-voyant", "ministère de la guerre" par "ministère de la défense" nous n'osons plus nommer une chose par son nom à l'instar de notre regard se détournant devant les choses qui nous dérangent.
À force de biaiser nous finissons par avoir les idées courbes. Tout naturellement. Cette forteresse construite sur du vide, sur cette incapacité à affronter, climatisée ou bien chauffée, nous coupant de la réalité du climat de la vie nous donne cette assurance prétentieuse dont seuls les imbéciles sont pourvus.
La lâcheté nous porte à calculer sans arrêt pour ne pas nous retrouver devant les faits ou nous-mêmes. Obligés de constamment arranger, transformer, justifier pour faire coïncider la réalité avec notre angle de vue, nous instrumentalisons le présent et le vidons de sa richesse intrinsèque.
Certains le font avec brio et échafauderont tout un monde virtuel riche en apparence mais pauvre en ce sens qu'il ne correspond à rien. Un monde fabriqué sans réels fondements si ce n'est que celui d'élucubrations, de systèmes et de théories qui n'ont d'intérêts que de tenir occupé un cerveau qui n'est plus à même de se taire. Le bruit comme détournement, celui qui kidnappe l'attention nécessaire pour regarder et voir. Tourner le dos au présent vers un passé ou un futur que l'on imagine toujours fleuris.
Le lâche attend. Il s'occupe pour ne pas se rendre compte que finalement il attend. Il se perd en action, bouge sans cesse pour ne pas que la vie le rattrape, ce qu'elle fera le jour de sa mort!
Ce jour que je qualifierais de béni si j'étais croyant, implacable dans sa gande justice forcera notre regard à la regarder en face. La mort met les pendules à l'heure sans notre consentement. Elle devrait nous accompagner à chaque jour mais notre stupide prétention l'ignore, veut l'ignorer. Nous vivons comme si nous étions immortels avec des maladies de gens qui se pensent immortels. Nous pensons et agissons comme des dieux, dans le mauvais sens du terme...
Collectivement nous sommes lâches.
Une culture qui accepte que les enfants et le silence soient devenus des armes, eux qui nous ont rien fait, que les Arts ou la pensée soient devenus des outils pour l'expansion personnelle est une culture moribonde qui arrive à sa fin.
Il me semble, pour reprendre une idée d'Orwell, que l'optimisme est plus tragique que le pessimisme.
J'ajouterai que le pessimisme radical est peut-être le seul moyen de donner ses chances à un optimisme modéré.