J'entends à la radio ou lis dans les journaux que tel ou tel artiste vit sa passion, est passionné par ce qu'il fait ou alors que ce politicien est passionné par le désir de servir sa communauté, ou son parti, ses électeurs. Qu'en est-il au juste de ce sentiment, cet état.
La véritable passion ne serait-elle pas celle qui ne porte sur rien de particulier? Je veux dire que la passion honnête est celle qui n'aurait pas de sujet précis, que cette passion engloberait tout notre être, notre pensée, notre corps. Que tout le reste découlerait de cette façon d'aborder les choses. Autrement dit la passion vrai n'est pas sélective. C'est une façon d'être, d'approcher les choses et les gens, d'appréhender la vie, un désir de connaître pour se situer dans ce monde. La passion véritable débouche sur la connaissance de soi-même.
Je ne crois pas à cette passion qui isole, enferme, rend insensible, seul dans sa tour. Spécialistes, beaucoup d'artistes en sont là, habiles et intelligents uniquement dans leur domaine, stupides et ignorants pour le reste, ne voyant pas l'utilité d'ouvrir leur horizon pour nourrir ce qui ferait d'eux...des artistes dans le plein sens de terme!
Ces passions qui appauvrissent n'en sont pas. Elles portent un autre nom: ambition, égoïsme, opportunisme, prétention. Sûrement un peu de tout cela à la fois...
Ces artistes hyper spécialisés sont finalement de bons citoyens. Assez ignorants pour croire qu'ils vivent dans un pays réellement démocratique, assez ignorants également pour être convaincus que les choses doivent rester comme elles sont et même, qu'on peut se permettre de faire des leçons d'ouverture, de savoir-vivre, bref d'exporter notre vision du monde si supérieure...
Lors d'une entrevue radiophonique, un journaliste me demandait si les artistes seraient un vecteur de changement, porteraient en eux une vision différente des choses. Ma réponse fut instantanée. Je lui répondis que la plupart des artistes étaient devenus de petits entrepreneurs (quelques-uns plutôt gros...) et qu'en tant que tel, leur première mission étaient d'être rentable ou d'entretenir une image "exportable" et/ou politiquement "correct". Subventions obliges.
La culture comme industrie est un suicide...culturel.