Nous aimons les anecdotes, en sommes friands. Les petites histoires qui nous montrent des évènements ou des situations particulières, typiques, souvent sans conséquences. Je veux dire qu’elles ne portent pas à réflexion la plupart du temps à moins d’être d’une extrême vigilance. Leur intérêt est dans le détail, on reste collé à l’information que contient l’anecdote car c’est sa raison d’être. S’en contenter est, à mon avis, risqué.
Tout agréable qu’elle peut être, l’anecdote reste, la plupart du temps, sans grande portée car elle ne supporte pas une vision large des choses de la vie. C’est l’arbre qui cache la forêt. Elle est l’apanage, si on reste constamment à ce niveau d’information, si c’est notre façon coutumière de communiquer, d’esprits compliqués, superficiels voire mesquins. On insistera sur des sujets, on multipliera ad infinitum les histoires en pensant que c’est là que se trouve la richesse et l’intérêts de notre existence. Nous sommes alors dans la quantité au lieu de se pencher sur la profondeur et la signification de la vie. Nos sommes dans l’horizontalité au détriment de la verticalité.
Les journaux et les médias en général (je ne parle pas des réseaux sociaux…) sont remplis d’anecdotes. On nous amène à penser que d’être informé c’est savoir ce que pense ou fait tel personnage, homme politique, ce que pense ce parti, leur position face à tel ou tel sujet. On suivra avec intérêt les tribulations et décisions de nos ministres, dirigeants, hommes et femmes d’affaire etc. On prendra position, convaincus que nous sommes de participer ainsi à la vie citoyenne, convaincus que nous sommes ainsi responsables et actifs dans la cité.
L’esprit anecdotique discourra-un exemple bien contemporain- sur les valeurs de la gauche et de la droite sans remettre en question cette façon de voir bien puérile à mon sens. L’esprit anecdotique parlera de la religion de tel ou tel politicien américain au lieu de se pencher sur le phénomène de la croyance chez l’Homme, les raisons de son existence et de sa popularité. L’esprit anecdotique multipliera les occasions de montrer la vie comme on pourrait la voir dans un microscope, le nez penché sur un monde bien petit. Nous sommes alors cette grenouille au fond du puit qui pense que le ciel se résume à la vision du fond de son trou.
On s’attache aux détails et on oublie le fond. Cela permet de multiplier ad nauseam les articles, de vendre de la copie tout en prétextant une richesse d’informations, une multiplicité de points de vue et d’opinions.
Cette façon de voir débouche rapidement sur la démonstration, les cancans et autres conciergeries qui peuplent nos médias.
Il y a pire que de ne pas être informé, c’est de penser que nous le sommes.