Je suis de plus en plus convaincu que de nombreux problèmes auxquels la société québécoise est confrontée proviennent en fait dans le genre ou la direction que prend l'éducation de nos enfants et ce, dès leur plus jeune âge.
Ce problème m'intéresse au plus au point étant père de deux enfants, je vis la situation de garde partagée, ne voyant mes filles qu'une fin de semaine sur deux, dans le meilleur des cas. Mon horaire de musicien étant plutôt anarchique et les concerts souvent donnés les week-end, tout cela ne faisant que compliquer la venue de mes enfants sur une base régulière.
Je caresse un projet depuis un moment déjà, celui de partager ma situation qui, j'en suis certain, est vécu par un grand nombre de pères dans notre société. Les séparations sont monnaie courante mais peu de parents partagent (surtout les pères!) les nombreuses difficultés qui se dressent devant leur état. Peu de littérature, pas grand chose à se mettre sous la dent ormis les spécialistes avec leur jargon pédagogique finalement assez loin de la réalité. De la mienne en tout cas et de plusieurs d'entre vous, j'en suis convaincu. Ce projet d'écriture et de partage porte un titre. Il m'est venu presque au début de ma réflexion et m'apparaît comme la source de mon désir de faire part de mon expérience: Le Silence
Silence. Pour moi, cela résume bien ce qu'on voudrait de la part de beaucoup de pères au Québec...Silencieux. On les voudrait silencieux, comme si l'éducation des enfants était une chose réservée aux femmes, une chasse gardée. Je me demande jusqu'à quel point ce n'est pas un prétexte pour justifier une certaine tyranie, un pouvoir exercé sur le "mâle" pour l'exclure des décisions qui pourraient changer le destin de leur progéniture. On nous a souvent rabâché les oreilles avec l'importance de découvrir notre côté féminin, de le cultiver. Encore faut-il nous donner l'occasion de le mettre en valeur...Mais la société est-elle prête pour cela? Le mouvement féministe a, dieu soit loué, permis certaines avancés pour les femmes (il reste encore beaucoup de choses à réaliser) avec des réactions de défenses de la part de beaucoup d'hommes mais on entend peu parler de l'inverse il faut dire!
Le sentiment d'insécurité des d'hommes (pas tous!) face au mouvement féministe, ce sentiment de perte d'identité serait-il également à l'oeuvre dans le cas contraire? La volonté de plusieurs hommes de vouloir prendre en main (en partie) l'éducation de leurs enfants, de s'investir, si ce n'est en temps du moins en qualité, serait-elle encore et après tout pas vraiment accepté et même suspecte à plusieurs égards?
C'est donc avec ce projet de longue haleine, Le Silence, que je tenterai de mettre au jour différentes facettes, problèmes, blessures, joies, rapports de force, auxquels plusieurs d'entre nous font face quotidiennement dans cette aventure qu'est l'éducation dans un contexte de garde partagée (qui devrait être vu comme un projet commun, ce qui n'est pas souvent le cas).
Je me donne plusieurs années pour compléter mes observations. Celles-ci ont commencé il y a maintenant 4 ans (+ ou -) suite à un "clash" (j'y reviendrai) qui m'a ouvert les yeux sur une situation vécue qui mérite mieux que ce silence dans lequel on voudrait nous tenir et qui fait l'affaire de beaucoup trop de gens. Dans le meilleur des cas, un livre sera édité lorsque mes enfants auront 18 ans. Elles en ont 11 maintenant. Projet de longue haleine vous dis-je.
Pourquoi en parler maintenant?
Suite à un appel d'un ami me brossant sa situation similaire à la mienne et devinant sa souffrance au travers de son silence, de non-dits, j'ai décidé de mettre mon projet, mon intention, publique. Voilà, c'est fait.
Non, tu n'es pas seul mon ami.
Ce silence qui s'accompagne de souffrance, je l'ai trop vu dans ma jeunesse où des hommes en apparence aphones, pris pour des banques ou uniquement pour des pourvoyeurs n'avaient pas droit ou étaient mal venus (et souvent cela faisait leur affaire peut-être...mais pas sûr!) d'interférer dans la merveilleuse tâche de rendre leurs enfants libres. Bien éduqués quoi.
On ne construit pas une société sur du silence, surtout si celui-ci renferme une part de souffrance.