Prendre le temps pour réfléchir, rêver. Cette phrase semble être une évidence au premier abord. Ce dont on ne parle pas (ce que je m'empresse de faire...) c'est de la qualité de la réflexion et ce que réfléchir implique. Pareil pour les rêves.
Réfléchir et rêver c'est mettre en branle le processus de la pensée. C'est donc rester dans le passé, utiliser le passé pour voir...le présent? Si je parle de l'importance du présent c'est que je crois que nous sommes constamment dans le passé et que cela pose problème. Je vois venir cette conclusion qui vous fera dire que ce "concept" est bouddhiste ou venant de quelque religion orientale! Voilà un bel exemple de raccourci que la pensée utilise pour évacuer un sujet brûlant (en ce qui me concerne). Oui oui...On connaît...On connaît intellectuellement mais cela est loin de suffire! On reste ainsi à la surface, bien sécuriser dans notre savoir théorique et somme toute inutile! On peut connaître sans savoir!
Je continue.
La perception, le fait de voir en utilisant la pensée et les connaissances, de manier des concepts qui, pour être intéressants, ne sont que du passé (la connaissance n'étant que du passé), nous empêche de voir le présent dans toute sa fraîcheur et sa pleine signification, son essence. Les concepts sont des raccourcis, des idées toutes faites (vraies ou fausses, là n'est pas la question) sur les sujets qui nous intéressent. Si nous voulons creuser le sens de la réalité, du réel, de ce qui nous entoure seconde après seconde, nous devons nous débarrasser des ces concepts, théories, valeurs, opinions, conclusions pour voir plus loin. Voir avec l'aide des connaissances est très différent que de simplement voir.
Je ne dis pas qu'il faille tout rejeter tout le temps mais être conscient que ces deux façons d'aborder les faits, les choses et les gens sont différents et peuvent donner une perspective nouvelle à notre façon de vivre. Ce n'est pas dans notre culture de voir sans passer par nos connaissances. Je dirais même que cette vision met, en général, les intellectuels sur la défensive parce qu'elle remet en cause (ou plutôt à sa place) toute la tradition de la glorification de la pensée, qui est ce avec quoi ils travaillent jour après jour. Être d'accord ou non intellectuellement avec ce fait n'est pas suffisant et finalement inutile, il faut l'expérimenter. Et si j'en parle, ce n'est pas parce que j'y parvient, c'est que j'en suis conscient. C'est un premier pas.
Les connaissances ont évidemment leur place et utilité, il faudrait être fou pour penser le contraire. Tout ce que je dis c'est qu'il est possible et souhaitable dans certaines occasions de taire ce savoir (ici utilisé comme la somme des connaissances) et regarder avec un esprit libre, libre de ce savoir qui voudrait prendre toute la place et nous enchaîner à notre passé.
Voir de cette façon pourrait se nommer méditation. Je ne parle pas de cette méditation que l'on croit ne pouvoir se faire qu'assis, les jambes croisées avec un peu d'encens pour purifier l'atmosphère. Cette méditation je la laisse au bourgeois qui pense pouvoir "attraper" ou acquerir de la spiritualité en suivant des recettes miracles. Non, je parle de cette méditation qui est un état d'esprit qui peut survenir à tout moment qui fait que nous ne sommes plus le centre de nos préoccupations. S'assoir pour méditer est encore une façon de s'évader.
Être en état de méditation c'est être la perception. C'est être hors du temps, hors du champ de la pensée.
J'ai la chance de pratiquer un art (la musique) qui exige cette qualité de non-présence à soi-même lorsque prise au sérieux. C'est un défi magnifique et une joie indescriptible d'être dans cet état. Et ce n'est pas une question de volonté mais de laisser aller assez difficile à expliquer. Difficile car tout en utilisant des connaissances nous devons être totalement dans l'instant présent. Il y a donc une contradiction que je ne m'explique toujours pas. Il existe pourtant un lien quelque part...
J'ai encore beaucoup de chemin à parcourir!!