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1 août 2019 4 01 /08 /août /2019 16:12

Ça brassait pas mal dans l’hémicycle. Les projets de loi proposés par la présidente ne faisaient vraiment pas l’affaire de l’opposition virtuelle. Cela n’avait finalement que peu d’importance car il y a longtemps que la véritable opposition était interdite. On en avait gardé que les rituels, que l’image. On ne vociférait que par principe. Tout le monde savait bien que toute organisation qui se structurerait véritablement et aurait un impact sur les citoyens était proscrite, interdite, détruite, dissoute; elle, ses dirigeants et ses adeptes.

La nouvelle présidente proclamée avait 14 ans. Son projet de loi (projet de loi appelé Vanasse en l’honneur de son concepteur et que de méchantes langues nommaient vinasse) ramenait l’âge interdit à 35 ans. On trouvait (par principe) qu’elle allait trop loin. Aujourd’hui l’âge interdit se situait très exactement à 50 ans. Arrivé à ce seuil on vous retirait le droit de vote, le droit de travailler et toute communication publique vous était interdite. Un peu partout on avait installé des suicidaires qui leur était réservé, sorte de cabine où, pour quelques dollars, on pouvait mettre fin à ses jours proprement et sans douleurs. Il suffisait de prouver que l’on avait l’âge interdit, l’âge de disparition. La population mondiale avait beaucoup chuté depuis l’avènement du gouvernement unique...

Les changements climatiques avaient eu raison de la démocratie. On avait interdit les transports comme l’avion, les bateaux (ou alors ils fallait qu’ils fussent à voile), la voiture à essence ou électrique. Les fumeurs étaient emprisonnés et rééduqués. Les relations hétérosexuelles étaient pratiquement interdites et l’homosexualité fortement recommandée. Les robots s’occupaient de la reproduction. Faire un bébé en dehors des couveuses pouvait vous coûter fort cher. Toute personne surprise à acheter ou manger (le marché noir était florissant!) de la viande était abattu sur le champs. Pour montrer l’exemple. Ces carnivores méritaient la mort puisqu’ils s’en nourrissaient. Les écoles (on les nommait aujourd’hui centre de rééducation) se chargeaient de rendre ces meurtres et cette absence presque totale de liberté comme bons et inéluctables, comme une marque de progrès. On avait fini par accepter l’idée qu’une vie humaine ne valait pas plus que la vie d’un ver de terre ou celle d’un céleri.

Les citoyens avaient renoncé peu à peu à leur liberté. Ils lui préféraient l’air pur.

Noël approchait. L’air était en effet pur et doux. C’était le printemps.

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Published by Yannick Rieu - dans Culture

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